Saison des pluies au Burkina : le réseau routier n’est pas à la hauteur

Article : Saison des pluies au Burkina : le réseau routier n’est pas à la hauteur
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9 septembre 2020

Saison des pluies au Burkina : le réseau routier n’est pas à la hauteur

Depuis le mois de mai, le Burkina Faso est rentré de plein pied dans la saison pluvieuse. Ainsi, jusqu’à début Octobre, le pays des Hommes intègres bénéficiera d’une pluviométrie abondante au grand bonheur des agriculteurs qui espèrent faire de bonne récoltes. La pandémie du coronavirus a eu des répercussions notoires sur le secteur agricole burkinabè et les agriculteurs mettent actuellement les bouchées doubles en cette saison des pluies pour limiter les dégâts. Il est vrai que cette période de l’année est une aubaine pour l’agriculture burkinabè, mais dans le même temps, c’est aussi une période d’angoisse et de crainte pour beaucoup de mes concitoyens.

Depuis de nombreuses années et à cette même période, mon pays est confronté à des inondations qui occasionnent d’innombrables dégâts tant matériels qu’humains. Le Burkina ne dispose d’aucun système de drainage et d’écoulement des eaux de pluie, ce qui est préjudiciable aux populations. Dans ce billet, je vais m’attarder sur un volet essentiel, il s’agit de l’état calamiteux des routes pendant la saison hivernale.

Bobo et ses routes durant l’hivernage, c’est pas du tout simple

En temps normal, la qualité du réseau routier au Burkina laisse déjà à désirer, mais durant la période des pluies, c’est tout simplement la catastrophe. C’est la croix et la bannière pour arriver à se déplacer. L’espérance de vie des engins à deux et à quatre roues chute brutalement et ce sont les mécaniciens qui se frottent les mains car ils vont réaliser de bonnes affaires. Je vais vous emmener à la découverte de certaines voies dans ma ville de Bobo-Dioulasso durant cette période d’hivernage où des quartiers de Bobo sont coupés du reste du monde quand dame nature ouvre les vannes.

Secteur 24 de la ville de Bobo-Dioulasso, on a l'impression d'être en présence d'un barrage, mais il s'agit de l'état d'une voie après le passage de la pluie- Crédit Photo Amos Traoré
Secteur 24 de la ville de Bobo-Dioulasso, on a l’impression d’être en présence d’un barrage, mais il s’agit de l’état d’une voie après le passage de la pluie- Crédit Photo Amos Traoré
Les plus téméraires forcent le passage à l'image de ce moto taxi- Crédit Photo Amos Traoré
Les plus téméraires forcent le passage à l’image de ce moto taxi- Crédit Photo Amos Traoré
Les riverains sont confrontés à des risques sanitaires et des inondations avec ces marres d'eaux stagnantes- Crédit Photo Amos Traoré
Les riverains sont confrontés à des risques sanitaires et des inondations avec ces marres d’eaux stagnantes- Crédit Photo Amos Traoré

Dans quelques mois, le Burkina Faso va fêter le 60e anniversaire de son accession à l’indépendance. Comme d’habitude, les responsables politiques vont entonner des discours vrombissant empreints de populisme et de démagogie pour affirmer que le Burkina est sur la voie de l’émergence (ah, ces hommes politiques ont vraiment de l’humour !). Après 60 ans d’indépendance, nous ne sommes pas capables de mettre en place un réseau routier performant à l’intérieur de nos villes. Nous investissons dans des choses inutiles, nous n’avons aucune vison pour un développement durable et surtout nous passons notre temps à accuser les autres de nos limites et de nos carences.

Un éternel recommencement

Ça me fait mal de le dire, mais comment on peut respecter un pays qui ne tire jamais de leçons du passé et qui passe son temps à s’embourber dans un folklore qui ne fait que l’enfoncer. Aucun sens de l’anticipation, aucune projection. Nous sommes toujours dans des vieux carcans qui ne nous apportent rien. Continuons notre tour d’horizon du réseau routier de Bobo. Cette fois je vous amène au quartier historique de Sarfalao. Durant la saison des pluies, ce quartier a une sinistre réputation et vous verrez pourquoi

L’eau des pluies créent de profonds sillons au niveau des routes du quartier Sarfalao- Crédit Photo Naim Touré
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Vu l’état de ruine de cette voie, elle peut être classé au patrimoine mondial de l’Unesco, des voies comme celle-ci il en existe plusieurs dans ce quartier- Crédit Photo Naim Touré
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On a l’impression de se trouver dans un paysage lunaire, je me demande bien comment ce riverain arrive à avoir accès à son domicile- Crédit Photo Naim Touré

Vous venez maintenant de constater pourquoi je disais que le quartier de Sarfalao avait une sinistre réputation pendant la saison des pluies. Attention, mon intention n’est pas de dénigrer ce beau quartier qui m’est cher, j’ai de nombreux proches qui habitent ce quartier et durant toute l’année, je passe d’agréables moments à Sarfalao. J’étale des faits qui sont palpables et qui sont visibles depuis de nombreuses années. Sarfalao est un lieu de brassage culturel où il fait bon vivre mais ses habitants souffrent le martyre une fois que la saison des pluies s’installe. Pour achever ce tour d’horizon, mettons le cap sur le secteur 25 de la ville de Bobo-Dioulasso, là où j’habite. Voua allez voir, là-bas aussi c’est le calvaire durant cette saison pluvieuse.

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Au Secteur 25, c’est le même constat et je peux vous assurer que c’est la même chose chaque année- Crédit Photo Amos Traoré
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No comment- Crédit Photo Amos Traoré
Les riverains tentent de colmater les brèches avec les moyens du bord en déversant de la terre rouge à certain endroit comme c'est le cas ici. Malheureusement, une fois qu'il pleut, la voie devient impraticable Crédit Photo- Amos Traoré
Les riverains tentent de colmater les brèches avec les moyens du bord en déversant de la terre rouge à certain endroit comme c’est le cas ici. Malheureusement, une fois qu’il pleut, la voie devient impraticable Crédit Photo- Amos Traoré
Pour arriver à me déplacer de manière plus pratique, j'enfourche fréquemment mon vélo de course alias le "spitfire" j'arpente alors les voies rocailleuses à la manière d'un coureur sur la course cycliste Paris-Roubaix Crédit Photo-Amos Traoré
Pour arriver à me déplacer de manière plus pratique, j’enfourche fréquemment mon vélo de course alias le « spitfire » j’arpente alors les voies rocailleuses à la manière d’un coureur sur la course cycliste Paris-Roubaix Crédit Photo-Amos Traoré
Souvent il faut attendre quelques minutes voir des heures pour que l’eau puisse s’écouler avant de pouvoir se déplacer

La dégradation des routes durant la saison pluvieuse est constatée dans de nombreuses villes du Burkina Faso. Le comble dans tout ça, c’est que le même scénario se répète chaque année mais ne nous ne sommes pas en mesure de tirer des leçons pour améliorer les choses. Nous devons avoir le courage de nous regarder dans le miroir et de nous assumer afin, on ne peut pas continuer indéfiniment dans cette médiocrité.

Face à la saison des pluies, l’innovation ?

De nombreux défis attendent le Burkina Faso dans les années à venir dans plusieurs domaines et pour relever ces défis, les infrastructures routières sont primordiales. Ne dit-on pas que le développement d’un pays passe par le développement de son réseau routier? Pour masquer leurs incapacités, les pouvoirs publics estiment que le coût de réalisation des routes est bien trop élevé pour un « pays pauvre » (je déteste cette étiquette qui nous colle à la peau). Cependant, les décideurs oublient que nous sommes au 21e siècle et que c’est le siècle de tout les possibles.

Il existe aujourd’hui de nombreuses alternatives pour remédier au coût élevé de la construction des routes. Si nous prenons le cas des déchets plastiques qui pullulent partout au Burkina, on peut les valoriser et les transformer en sorte de goudron. Cela permettra de réhabiliter nos voies afin qu’elles soient en phase avec nos réalités. Des pays innovent déjà en la matière comme c’est le cas en Inde et rien ne peut empêcher le Burkina Faso d’emprunter la même voie.

Nous avons les ressources humaines sur place, des hommes et des femmes extrêmement qualifiés qui peuvent exécuter tout un tas d’innovations pour le bien être des populations, il manque juste la volonté politique. Arrêtons de nous cacher derrière des excuses, arrêtons avec le fatalisme, arrêtons avec ce complexe mal placé qui nous fait croire que nous n’avons pas la technologie nécessaire pour exécuter certains projets. Fusionnons nos énergies et rêvons grand et bien pour bâtir un cadre de vie propice à l’épanouissement de la population, ce n’est que comme ça que nous arriverons à sortir la tête de l’eau.

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