Zakaria Sanou, jeune spécialiste de l’élévage burkinabè aux grandes ambitions

Article : Zakaria Sanou, jeune spécialiste de l’élévage burkinabè aux grandes ambitions
Crédit: Crésit Photo : Zakaria Sanou avec son autorisation pour utilisation
26 avril 2023

Zakaria Sanou, jeune spécialiste de l’élévage burkinabè aux grandes ambitions

Zakaria Sanou est vétérinaire de formation et entrepreneur dans le domaine de l’élevage depuis quelques années maintenant. Le jeune homme fait partie d’une nouvelle génération d’acteurs de l’élevage qui innove avec beaucoup d’audace, afin de mettre à la disposition des burkinabè des races animales de qualité supérieure.

L’élevage, un domaine qui n’a plus de secret pour Zakaria Sanou

Grâce au boom minier ses dernières années, l’économie du Burkina Faso a gagné en compétitivité, cela a permis de faire entrer des devises importantes dans les caisses de l’État. L’or est aujourd’hui le premier produit d’exportation du pays des hommes intègres, mais il n’en demeure pas moins que l’agriculture et l’élevage conservent leur place de pilier au sein de l’économie nationale. Ces deux secteurs ont toujours été des références dans la contribution au PIB du pays. L’élevage burkinabè est cité en exemple dans la sous-région ouest-africaine et même sur l’ensemble du continent.

Un véritable passionné d’élevage crédit photo : Zakaria Sanou – avec son accord pour utilisation

Que ce soit avec la volaille, le bétail ou le poisson, les acteurs du monde de l’élevage ont toujours mis sur le marché des spécimens de qualité. Le secteur est pourvoyeur de nombreuses opportunités aussi bien pour l’économie nationale que pour les populations.

Ambitieux, Zakaria Sanou met son expertise au service de différentes structures (particuliers, ONG, associations…). Il contribue par son esprit entrepreneurial à apporter une plus-value au domaine de l’élevage burkinabè. Le jeune homme me fait l’immense honneur de m’accorder un entretien dans lequel il nous explique son actualité, sa vision de l’élevage burkinabè et ses projets.

Amos Traore : Sanou Zakaria, pouvez-vous vous présenter ?

Zakaria Sanou : Bonsoir Monsieur Traore, je me nomme Sanous ZAKARIA, technicien d’élevage, spécialisé en santé et production animale et résidant dans la province de la Kossi, région de la Boucle du Moouhoun (Ouest du Burkina).

Amos Traore : Vous présentez un parcours atypique avec une triple casquette d’expert en médecine vétérinaire, en production animale mais aussi zootechnicien. Qu’est-ce qui vous a poussé à embrasser cette voie ?

Zakaria Sanou : Personnellement, depuis le bas âge, j’ai développé un amour profond pour les animaux. Quand j’étais au lycée, je côtoyais un vétérinaire d’ethnie Peul qui était aussi mon ami. On cultivait ensemble dans son champ. Il possédait des animaux, de la volaille (poules pondeuses), et à force d’être ensemble il a renforcé mon amour non seulement pour les animaux mais aussi pour sa profession de vétérinaire. Voilà ce qui m’a poussé à me lancer dans le domaine.

Amos Traore : En tant que spécialiste du domaine, quel regard portez-vous sur le secteur de l’élevage au Burkina Faso ?

Zakaria Sanou : Le  secteur de l’élevage au Burkina est source d’espoir pour la population malgré la fait qu’il soit confronté à de nombreuses contraintes. Le gouvernement fait de son mieux pour trouver des mécanismes dans le but d’amener des innovations dans le secteur.

Mais il faudra du temps et de l’organisation car il ya  beaucoup de choses à améliorer dans le secteur, au niveau étatique, privé, et même au niveau des producteurs. Je disais tantôt que l’élevage au Burkina Faso rencontre de nombreuses difficultés. Le manque criard d’aliments et leur cherté sur le marché est un frein pour bon nombre d’éleveurs.

Au Burkina, il y a aussi manque de formation des éleveurs. Dans de nombreux cas, ils ne disposent pas de connaissances de bases, ce qui constitue des barrières qui ne leur permettent pas l’optimisation de la chaîne d’élevage. Notons également la survenue des pathologies animales et l’insuffisance des techniciens d’élevage pour le suivi sanitaire des animaux. Il y a donc un gros effort à faire au niveau de la formation.

Crédit photo : Zakaria Sanou avec son accord pour utilisation

Vous savez, aujourd’hui, l’élevage s’intègre dans une chaîne de valeur, avec la production de semences et de cultures fourragères. Malheureusement, les différents acteurs du milieu ne se sont pas appropriés cette notion de chaîne de valeur, d’où la quasi absence de zone de pâturage et de culture fourragère.

Amos Traore : Quelles sont les innovations qui peuvent apporter une plus-value à l’élevage burkinabè ?

Zakaria Sanou : L’élevage au Burkina Faso est principalement de type traditionnel. Il faudrait apporter de l’innovation pour dynamiser le secteur, il faut mettre en place un environnement qui encourage l’introduction de races exotiques performantes en termes de production (lait, chaires, et œuf) et aussi réactualiser les formations au profit des producteurs sur les techniques nouvelles de production animale.

Nous avons assez de potentiel pour tirer les meilleures opportunités de ce secteur. Nous devons prendre des décisions audacieuses et former de très bons experts locaux spécialisés notamment dans la production d’aliments adaptés à nos différentes races animales.

Selon moi, la production fourragère avec la culture du Mukuna, du Niébé, et d’autres poids ou plantes… est la clé. Il faut viser sur le long terme en misant sur la vulgarisation des nouvelles techniques et la sensibilisation des différents acteurs.

Amos Traore : Quelles sont les maladies auxquelles vous êtes le plus souvent confrontées ?

Zakaria Sanou : les maladies font partie des problèmes majeurs auxquels sont confrontés les producteurs au Burkina. Si je prends l’exemple de la volaille dans la zone où je réside, le plus souvent on est confronté aux pathologies suivantes : la maladie de New Castle ,le coryza ,et certaines pathologies bactériennes et parasitaires.

En ce qui concerne les ruminants, on peut citer la pasteurellose, et les pathologies cutanées, surtout pendant l’hivernage et certaines pathologies parasitaires nous ralentissent considérablement dans le processus de création de valeur ajoutée.

Amos Traore : Vous initiez régulièrement des formations au profit du grand public et de spécialistes de l’élevage. Quel est votre objectif à travers la dispensation de vos modules de formation ?

Zakaria Sanou : Tout à fait, j’organise des formations en « Techniques nouvelles de production en aviculture, apiculture, pisciculture et en embouche animale ». Le plus souvent, ces formations se font en présentiel et en ligne pour le bonheur du grand public. Ces formations répondent à deux principaux objectifs :

Primo:  L’objectif principal de mes formations est de vulgariser les nouvelles techniques de production en élevage, d’initier les populations en production intensive animale et d’éveiller en eux cette envie de faire de l’élevage un business.

Secondo: L’objectif secondaire est de me constituer un bon fonds de roulement qui ma permettra de créer mon cabinet d’élevage et de renforcer ma production animale

Zakaria Sanou en pleine séance de formation crédit photo : Zakaria Sanou avec son accord pour utilisation

Amos Traore : le Burkina Faso traverse une grave crise sécuritaire avec un nombre élevé de personnes déplacées internes. Des personnes ont dû abandonner leur cheptel pour échapper à une mort certaine. Dans ces conditions, comment réorganiser le secteur de l’élevage ?   

Zakaria Sanou : Avec la crise sécuritaire que nous traversons, l’élevage a connu un coup dur sur quasiment tous les plans, de la production en passant par la commercialisation et l’exportation à l’international, nous avons pris cher.

Pour une réorganisation de l’élevage au niveau des villages, il faut d’abord trouver les voies et moyens afin de permettre un retour des personnes déplacées internes dans leur localité d’origine. Plusieurs personnes déplacées internes étaient de grands éleveurs, mais ils ont été obligés de vendre leurs cheptels pour des raisons d’insécurité.

En attendant le retour de ces populations déplacées internes dans leur zone d’origine, il faut les aider à s’adapter et à encourager l’engraissement des animaux en claustration qui est une méthode qui permet d’engraisser les animaux dans une étable. Selon moi, cette technique est applicable dans les camps pour personnes déplacées internes. L’aviculture peut aussi s’adapter à cette technique, notamment dans les villes.

Amos Traore : Selon vous, est-il possible d’intégrer les personnes déplacées internes dans une chaîne de valeur qui prendra en compte leurs connaissances au niveau des sites d’accueil ?

Zakaria Sanou : Par rapport à l’intégration des personnes déplacées internes dans une chaîne de valeur, c’est possible, mais très difficile dans un contexte de forte inflation marqué par l’augmentation du coût de la vie. On peut former les personnes déplacées internes en production animale pour leur vie d’après, sinon actuellement, ils peinent à manger.

Avec le prix élevé des aliments pour bétail et volaille, et le manque d’espace, ce n’est vraiment pas évident. Des projets ont essayé de doter des personnes déplacées internes en petits ruminants, mais très rapidement, elles ont vendu les animaux pour pouvoir se nourrir.

Je préconise d’essayer de mettre à la disposition des personnes déplacées internes de petits enclos où ils vont élever par petits groupes soit des ruminants, soit de la volaille afin d’avoir à leur disposition de la viande, des produits laitiers… Quand le volet « pitance quotidienne » sera assuré, là maintenant on pourra passer à un autre niveau.

Crédit photo : Zakaria Sanou avec son accord pour utilisation

Amos Traore : Sur le plan sanitaire que préconisez-vous pour un meilleur suivi des animaux destinés à l’élevage ?

Zakaria Sanou : Les animaux destinés à l’élevage sont confrontés à de sérieux problèmes de santé. Pour y faire face, il faut beaucoup sensibiliser les éleveurs sur les bonnes pratiques en élevage et sur les techniques de prévention des maladies qui sont entre autres : l’accentuation sur l’hygiène dans les unités de production animale, et les vaccinations contre certaines pathologies.

Amos Traore : En termes de productivité et de rentabilité, quelles sont les races animales qui s’adaptent le mieux à l’environnement du Burkina Faso ?

Zakaria Sanou : Le climat et l’environnement du Burkina sont propices à l’élevage. Nous avons des races locales de bœuf et de petits ruminants qui ont un rendement boucher et laitier faible.

Au-delà de nos races locales, nous avons des races de bovins (bœufs) tels que la race « Azawak » et « Goudaali » qui ont des rendements bouchers et laitiers très élevés. Pour les moutons, on a les « Balibali » qui ont un très bon rendement boucher et qui s’adaptent très bien au climat humide. En ce qui concerne les chèvres, on a la race rousse de « Maradi » qui présente de nombreux avantages et qui s’adapte facilement à notre climat aussi.

Amos Traore : Quelles sont les types d’élevage qu’on rencontre le plus au Burkina ?

Zakaria Sanou : Au Burkina on rencontre principalement 3 types d’élevage.
Il y a l’élevage traditionnel à caractère extensif sans technique nouvelle de production, qui est leplus pratiqué par les agriculteurs. L’élevage semi-traditionnel ou semi-intensif, à cheval entre l’élevage intensif et extensif. Et enfin, l’élevage intensif qui tient compte des nouvelles techniques de production animale, à savoir l’ensemble des paramètres de production (soins de santé respectés, alimentation règlementée selon la règle vétérinaire, production selon les normes techniques)

Amos Traore : De lus en plus de jeunes veulent se lancer dans l’élevage. Quels conseils donneriez-vous à ces jeunes ?

Zakaria Sanou : De nos jours on remarque effectivement que la jeunesse se lance avec beaucoup d’enthousiasme dans l’élevage. Le conseil que je peux donner à ces jeunes, c’est d’avoir en premier lieu la passion, l’amour de l’activité.

Ensuite, il faut absolument prendre le temps de se former avant de se lancer pour éviter les désillusions. Enfin, il faut prendre au sérieux l’activité, car en la négligeant, tu n’obtiendras rien en retour. L’entrepreneuriat est une aventure et il faut s’armer de beaucoup de courage et d’abnégation. L’élevage n’est pas une activité pour les paresseux ou pour celui qui manque de temps.

Amos Traore : Comment voyez-vous l’avenir de l’élevage au Burkina Faso ?

Zakaria Sanou : L’élevage au Burkina occupe et continuera d’occuper dans les années à venir une place importante dans le PIB national vu que bon nombre de concitoyens s’y intéressent. De son côté, le gouvernement consent aussi à de nombreux efforts pour accompagner le secteur. On peut espérer un boom ou un regain de l’activité de l’élevage au Burkina.

Crédit photo : Zakaria Sanou avec son accord pour utilisation

Amos Traore : Qu’est qu’on peut vous souhaiter pour cette année 2023 ?

Zakaria Sanou : Pour l’année 2023, j’aspire d’abord à une santé de fer ! Ensuite, plus d’opportunités de formation, beaucoup de courage dans l’accomplissement et l’atteinte de mes objectifs. L’objectif ultime est de pouvoir mobiliser assez d’argent pour la mise en place de mon cabinet vétérinaire.

Amos Traore : Comment vous joindre ?

Zakaria Sanou : Je suis le plus souvent joignable en appel sur le +22670734778

Sur le WhatsApp : +22676791377

Sur mon compte Facebook : Sanou Zakaria

Mail : sanouzakaria210@gmail.com

Amos Traore : Quel est votre mot de fin ?

Zakaria Sanou : Je vous remercie pour la considération et pour m’avoir permis de parler de mon domaine. Merci à vous.

Zakaria Sanou est la preuve que le Burkina Faso possède un vivier de jeunes experts audacieux dans quasiment tous les domaines. Il appartient aux premiers responsables burkinabè de créer un environnement stimulant pour utiliser au mieux le savoir de ses jeunes experts. Le pays des Hommes Intègres ne doit plus se chercher d’excuses. Il est grand temps de se mettre au travail pour faire du Burkina Faso un eldorado de référence. Ayons confiance à notre expertise locale pour faire la différence.

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